Sigonce 04 Nos souvenirs

 

Sigonce ... Les Jardins partagés de la mine.

Juste après la guerre, la direction des mines décide de louer pour ses ouvriers presque tous les terrains qui partaient après la source du Pesquier exceptés ceux de messieurs Blanc Aimé, Turin Ismaël et allant pratiquement jusqu'au Plus bas Moulin excepté aussi le terrain du Grand Jardin de 3ha70 qui était communal et loué à un agriculteur.

 

Le bail était renouvelé tous les 9 ans en présence d'un notaire à la mairie et donné au plus offrant à celui qui avait surenchéri juste avant l'extinction de la petite bougie. (C'était l'enchère à la bougie).

Donc tous ces terrains étaient réservés et attribués gratuitement aux ouvriers mineurs qui en faisaient la demande. Chacun en avait une belle longueur jusqu'au canal et une bonne largeur de 10m environ. C'était vraiment la culture biologique dans tous ses états.

Il y avait plusieurs sortes de légumes, pour ne citer que les plus courants :

Des tomates, des pois chiches, des haricots grimpants, des courgettes, des haricots nains, des poireaux, des blettes, des pommes de terre bien sûr, des carottes, des radis, des topinambours … et bien d'autres encore. 

Quel plaisir de jardiner après son travail ou après le repas du soir à "la fraîche" comme ils disaient !

 

Le plus difficile était de pouvoir arroser. À l'époque le canal qui longeait tous ces jardins (on l'appelait le canal du Pesquier) était pris d'assaut de jour comme de nuit. L'eau venant de la source était très abondante du fait qu' il n'y avait pas encore de desserte d'eau au village.

Ce canal était scrupuleusement entretenu par chaque ouvrier responsable de son lopin de terre. Il était régulièrement curé et maintenu à une profondeur d'au moins 1m et non plus 20 à 30cm comme on avait pu le voir par la suite après l'abandon des jardins.

 

Que de beaux légumes et quel goût, surtout les tomates qu'on dégustait parfois sur place avec un peu de sel apporté de la maison. Incroyable le monde qu'on pouvait voir après 15h (fin de la journée à la mine) sur ce grand terrain potager que chacun venait entretenir.

Il y avait une franche camaraderie entre ouvriers car très souvent l'un d'eux arrosait son jardin et celui du voisin empêché.

 

C'était pour la nuit qu'il y avait quelques problèmes :

Les jardiniers du dessus bloquaient très souvent l'eau pour la nuit en faveur de leurs jardins au détriment de ceux du dessous qui s'en trouvaient pénalisés pour leurs lopins de terre.

Alors ils attendaient le départ des ouvriers favorisés et allaient enlever le barrage pour pouvoir arroser tranquillement le leur.

Quand tout était terminé, ils refaisaient le barrage comme ils l'avaient trouvé et ni vu ni connu, c'était de bonne guerre !!!

 

Il n'y a jamais eu d'altercation sérieuse à cause de ce petit stratagème.

Les ouvriers s'aidaient, se respectaient et tout le monde y trouvait son compte.

 

La guerre avait marqué beaucoup de monde surtout dans la difficulté à trouver un peu de nourriture aussi il fallait tirer un grand trait sur ces mauvais souvenirs et essayer de se rattraper un peu ne serait ce que moralement avec ces jardins partagés qu'offrait gracieusement la Direction de la mine.

 

Émile Portigliatti

Les Jardins partagés de la mine.

 Nos souvenirs

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