Sigonce ... La Ste Barbe était dignement fêtée.
Sigonce qui fut jusqu’au 31 décembre 1960 un pays industriel par excellence (mine de charbon et usine à chaux), fêtait dignement tous les ans, le 4 décembre, la Ste Barbe.
À une certaine époque, le curé de Sigonce qui arrivait du Revest des Brousses pour remplacer le curé Ribotta, muté à Nibles, s’était beaucoup investi dans la célébration des fêtes religieuses dans notre paroisse de 1889 à 1906. Resté donc 17 ans parmi ses paroissiens, il fut un prêtre très estimé et écouté. De surcroît, il cultivait la langue provençale qu’il employait souvent dans ses prédications.
Le mercredi 4 décembre 1901, les ouvriers mineurs et les chaufourniers de Sigonce, s’étaient fraternellement réunis pour fêter leur patronne : Ste Barbe.
(Les chaufourniers ce sont les ouvriers qui travaillaient à l'usine à chaux et qui s'occupaient du four).
À la messe, à laquelle patrons et ouvriers assistèrent, fort religieusement, M. le curé, dans un touchant panégyrique de la sainte, leur dit le motif pour lequel les premiers mineurs chrétiens avaient choisi pour patronne cette jeune vierge.
Dioscore, dit la Vie des Saints, puissant et riche seigneur, avait une fille unique, Barbe, extrêmement belle. Elle était chrétienne. Il voulait, cruel bourreau, la faire apostasier ou la percer de son épée. Comme ce tyran courait après elle pour l’attraper, un rocher s’entrouvrit soudain par la vertu du seigneur à qui toutes les créatures obéissent, et la sainte se garantit du tigre son père, passant à travers.
Pour faire honneur à ces braves gens, l’église était parée comme aux plus grands jours de fêtes, et l’autel était revêtu d’ornements tout à fait de circonstance : les chandeliers avaient fait place aux barres à mine, auxquelles étaient suspendues les lampes des mineurs ; les bouquets étaient remplacés par les pics, par les pelles et par les tranchets. Des trophées de drapeaux aux couleurs de la vierge martyre et aux couleurs nationales ornaient le sanctuaire.
Après l’office, les sympathiques patrons, MM. Lauzier et Nalin, réunissaient tous leurs ouvriers dans un banquet dont un des meilleurs assaisonnements a été la plus franche gaieté.
Sainte Barbe était invoquée contre le tonnerre, la foudre et toutes les explosions produites par la poudre : mais elle est plus particulièrement la bonne providence des ouvriers mineurs qui, sous terre, pour se faire passage, perforent les rochers.
Enfin pour tout dire, ce fut une belle et très sainte journée ! Aussi, le soir, sur toutes les lèvres, on surprenait ces agréables paroles, programme de la fête :
An douna la benedicien, an fa vira lei campano, an abrasa touti lei ciro de l’autar-mestre, an predica, an canta an fa musico. Aquest’an, la festo es esta bello e grandasso. La Religioun ! O parla–me d’aco !
Ils ont donné la bénédiction, ont fait sonner les cloches, ont allumé tous les cierges du maître-autel, ont prêché, ont chanté et ont joué de la musique. Cette année, la fête a été belle et grandiose. La Religion ! Oh! parles-moi de ça !
Et les cérémonies se terminaient toujours ainsi :
Que Ste Barbe daigne toujours veiller sur nos braves travailleurs, les garder de tout accident et maintenir la joie, la paix et la santé à leurs foyers.
Par la suite, les fêtes religieuses s’estompèrent, pour laisser la place au traditionnel banquet de la Ste Barbe qui se tenait toujours au café Alpin. Mineurs et chaufourniers se retrouvaient autour d’une bonne table, oubliant ainsi, pour une journée, le danger, leur dur travail qu’ils pratiquaient tout au long de l’année. Petit à petit, les mineurs disparurent aussi et la Ste Barbe est toujours une fête, mais à Sigonce, elle n'est plus qu'un beau, mais un lointain souvenir.
Où sont les fêtes d'antan ?
En Provence, une tradition toujours respectée.
À Sigonce comme ailleurs en Provence les blés de la Ste Barbe font partie des traditions provençales issues d'un héritage païen antique ou préhistorique et reprises pour les fêtes de Noël.
Le jour de la Ste Barbe le 4 décembre il est coutume de planter du blé dans 3 coupelles pour assurer la prospérité de la famille.
Il décore également la table du gros souper de Noël le 24 décembre au côté des 13 desserts.
Entre le 26 décembre et l'Épiphanie, tel un petit champ il rejoint la crèche provençale.
L'Épiphanie dans le calendrier chrétien est un évènement majeur célébré le 6 janvier de chaque année commémorant la visite des Rois Mages venus adorer l'enfant Jésus à Bethléem.
Il est possible de remplacer le blé par des lentilles.
Faute de blé, l'une des 3 coupelles de lentilles plantées le 4 décembre 2023 à Sigonce.
La coutume s'est transmise de génération en génération et l'on continue toujours à planter du blé afin de maintenir du temps de Noël cette vieille tradition qui remonte à l'antiquité.
Lors de la dernière guerre ces "braves" paysans faisaient ce qu'ils pouvaient car les moyens étaient maigres pour nous donner une petite poignée de blé pour assurer notre petite et chère plantation.
Émile Portigliatti
La Ste Barbe était dignement fêtée.
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