Sigonce ... Ces bornes qui nous tenaient compagnie.
Pendant nos marches et nos randonnées, elles étaient là à nous regarder nous déplacer.
Je veux parler des bornes kilométriques et hectométriques.
Sigonce, ancienne borne kilométrique après la Bambou au lieu dit Les Ferrayes et nouvelle borne entre Sigonce et Montlaux.
Ancienne borne hectométrique quartier Pisay entre Sigonce et Montlaux.
Autrefois les gens se déplaçaient régulièrement à pied parce ce qu’ils ne pouvaient pas faire autrement, les moyens de locomotion étant rarissimes voire inexistants. Ils allaient facilement à Ongles, Lardiers, La Brillanne et très régulièrement à Forcalquier.
On ne pensait pas tellement à sa santé ou à son surpoids, la remise en forme se faisant naturellement.
Durant notre adolescence lorsque nous partions en bandes sur la route, le jeudi par exemple, (nous n'avions pas classe ce jour là) nous faisions les 9kms Sigonce-Forcalquier dans la joie et la bonne humeur. Tout le long de notre route nous comptions les bornes kilométriques blanches à chapeau jaune (car c’était une départementale) ainsi que les bornes hectométriques (tous les 100m) en pierre ou ciment qui nous donnaient encore plus de courage tant elles défilaient rapidement à nos yeux.
À une certaine époque après la guerre, nous nous sentions plus en sécurité, c’était la marche dans tous ses domaines : sur les routes, à travers les collines pour chercher des raccourcis, puis le progrès aidant nous allions à Forcalquier en vélo, plus tard en vélo moteur, puis en moto et enfin en voiture comme aujourd’hui.
Les vélos n’étaient pas de compétition car les pneus étaient rares ou chers et très souvent les tuyaux à air comprimé déclassés en provenance de la mine faisaient l’affaire. La portion de tuyau était enroulée autour de la jante, les 2 extrémités étaient maintenues et raccordées par un solide fil de fer en qui nous faisions confiance. Parfois ce lien de fortune cédait et c’était alors la chute inévitable. Pas de solution, il fallait revenir "pedibus" à la maison en poussant son lourd vélo.
En tombant nous avions pris des coups et avions quelques plaies qui saignaient mais nous gardions quand même le moral malgré les moqueries des copains qui avaient eu plus de chance.
Pour les vélomoteurs nous étions quelques uns à avoir des New-Map commandés chez les frères Espinelly garagistes qui étaient dépositaires de la marque. Nous avions économisé, les parents nous avaient un petit peu aidés et nous étions fiers sur notre belle monture au réservoir bombé de 7 litres.
C'était en août 1957.
De gauche à droite, Émile Portigliatti 19 ans et Gabriel Pardigon 17 ans avec leur vélomoteur New-Map, quartier La Bambou, sur l'ancien terrain Felix Trouchet où par la suite Maurice Audibert a fait construire sa villa, actuelle villa Giai-Checa Jean-Paul. En arrière-plan Daniel Palla.
Là, les bornes défilaient à toute vitesse !
C’est André Michelin qui a eu l’idée de la fabrication de ces bornes kilométriques et hectométriques placées en bordure de chaussée destinées à identifier la route concernée, bornes qui furent par la suite identiques dans toute la France. Elles ont été utilisées pour indiquer aux voyageurs la catégorie et le numéro de la route empruntée ainsi que les noms et les distances des 2 localités se trouvant en aval de la
borne, dans le sens de marche du lecteur.
Aujourd’hui les anciennes bornes kilométriques et hectométriques ont disparu.
Elles sont remplacées par des bornes plates de petit format qui jalonnent nos routes. Dans nos balades sur les routes de campagne quand nous en retrouvons quelques unes qui ont survécu nous avons un petit pincement au cœur car elles nous rappellent pleins de bons souvenirs de notre jeunesse en particulier.
Bien d’autres images nous viennent aussi à l’esprit : Les coqs qui chantaient sur un tas de fumier à 5h00 du matin, quelques vaches qui beuglaient dans les champs à notre passage, les troupeaux de moutons assez nombreux à l’époque qui marchaient en bêlant sur nos routes et chemins, "la jardinière", (voiture hippomobile découverte, suspendue, à 4 roues, munie à l'avant d'un siège à dossier et éventuellement à l'arrière d'une capote à soufflet), du père Jacquet (de son vrai nom Jacques Cabrier grand-père d'Yvon, Jean, Colette et Gilbert) qui venait faire ses courses au village en provenance de la Basse-Sautée et plein de belles choses encore...
Heureusement qu’à la campagne et à Sigonce en particulier nous avons encore quelques privilèges : un beau ciel bleu, un soleil resplendissant, un air pur pas encore pollué, une altitude idéale 502 mètres au pied des anciens escaliers du secrétariat de mairie et surtout des centaines de cigales qui chantent continuellement de concert durant la période estivale.
Que voulez vous de plus !!!
Vacanciers et touristes apprécient quand ils visitent notre beau village ou qu’ils y viennent passer une partie de leurs congés. Certains sont un peu surpris parfois lorsqu’ils entendent encore un coq rescapé se trouvant à la périphérie du village qui annonce de bon matin l’arrivée de l’aube ou bien l’horloge centrale qui égrène jour et nuit les heures et même les demi-heures. Les autochtones apprécient et ne pourraient pas s’en passer comme ce fut le cas pour de nombreuses générations avant nous.
Disons que ces plaisirs et ces avantages font un peu partie de notre patrimoine qu’il faudra toujours conserver et respecter !!!
Voilà pour le patrimoine, que voyons nous aujourd'hui pour le comportement ?
L'autonomie s'éloigne, nous entrons dans la dépendance !
Nous sommes scotchés sur nos smartphones qui par leurs nombreuses possibilités nous rendent, il est vrai, bien des services.
Plus besoin de montres ; de calculettes ; de réveils ; de calendriers ; de cartes routières et j'en passe...
Mais que se passe t-il lorsqu'il n'y a plus de batterie ou de réseau ?
Il faudra redécouvrir "les bonnes méthodes d'antan" !!!
Ancienne borne kilométrique sûrement récupérée par un particulier et placée en bordure d'un chemin vicinal sur la commune de Sigonce.
Témoin d'altitude (502m) fixé il y a très longtemps contre le mur, au pied de l'escalier de l'ancien secrétariat de mairie, par l'IGN (Institut Géographique National).
Émile Portigliatti
Ces bornes qui nous tenaient compagnie.
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